L’art contemporain, mon petit garçon et moi…

Dripping, Jackson Pollock L’art contemporain, mon petit garçon et moi… Surtout n’allez pas penser que je suis de ces mères hyst...

Dripping, Jackson Pollock


L’art contemporain, mon petit garçon et moi…

Surtout n’allez pas penser que je suis de ces mères hystériques à l’idée de vous présenter mon rejeton comme la septième merveille du monde, la plus grande œuvre accomplie par Dieu depuis l’invention de la roue Que nenni… Enfin… En fait, si, il est tout simplement génial, ses questions, son questionnement sur la vie, la mort, les dinosaures et spiderman sont la preuve éclatante d’un esprit particulièrement éclectique, brillant, moderne !
Alors pensez bien que lorsque son institutrice a écrit sous le préau « dessins et peintures des enfants de grande section de maternelle, d’après Jackson Pollock », j’ai cru perdre la raison, m’envoler définitivement au paradis des « man-mans » méritantes, celles qui apprennent les poésies de leurs enfants à leur place et attrapent un zona géant quinze jours avant les écrits du baccalauréat.
Sonia Dubois
J’allais découvrir ce que j’allais découvrir, mon fils Hippolyte (je vous donne son prénom car il me sert très souvent de trame, pas le prénom, le fils) devenait Jackson Pollock. Je cherchais, parmi les onze chanceux de la classe à être revenus à la maison mouchetés de la tête aux pieds, à apercevoir son œuvre. Son Chef-d’œuvre.
Il me crevait les yeux, peut-être plus par l’emploi de la couleur tango utilisée à profusion que par sa bonne exposition. C’est vrai, ça, pourquoi cette institutrice trop jeune, trop belle, trop mince, l’avait-elle collé en bas à droite, alors qu’on ne lit le nom des stars qu’en haut à gauche. Bref, je reviendrai sur son cas plus tard, elle ne perd rien pour attendre…
Voilàààààà… Ouiiiiii… Le Jackson Pollock de mon fils. Il me faut un sacré temps pour réaliser que c’est la toile de la chair de ma chair… Je suis là, la lippe pendante, quasi bavante, incrédule, ébahie, émue.
C’est à ce moment précis que je suis devenue une de ces extrêmement nombreuses mères du début des années soixante qui éructaient comme un seul homme que leur enfant de quatre ans maîtrisait mieux crayons et pinceaux que Picasso.
Je sais, quand on reparle de ça maintenant, on a toujours l’air un peu bébête, et pourtant avant que le plus grand Maître de l’art du XXe siècle n’ait eu la totalité de ses galons, de ses lettres de noblesse, les contre-allées des bacs à sable de maternelles bruissaient toutes du même air : mon gamin fait mieux !
Bouhhhh… Autant de vulgarité laisse le bas du dos glacé et les neurones en ébullition. Mais c’est comme je vous dis, les mamans, des êtres qui cessent absolument, rigoureusement, définitivement, d’émettre tout jugement objectif, de bon sens et rigoureux dès qu’on touche aux talents, non pas supposés, mais révélés de leurs rejetons.
Je croyais cette époque révolue. Voyant le prix des abonnements annuels à Télérama, Le Nouvel Obs et Libération en chute libre, je me disais que tout le monde était objectivement cultivé de nos jours, qui plus est notre très cher corps enseignant.
Non, non, pas du tout. Notez, pour un mauvais esprit dans mon genre, c’est très bon signe. On dit et on dira toujours n’importe quoi, sur n’importe quel ton à propos de n’importe qui…
Dans le cas présent, il ne s’agit pas de n’importe qui, s’cusez-moi, mais peindre Son Pollock à cinq ans, mon fils (et les dix autres appartenant à dix mères en pâmoison devant les dix œuvres) entre de plain-pied dans cette catégorie de petits génies « qui font mieux que Picasso », et ça, Madame, c’est pas rien
Voilà que se présente devant moi La Créature, Prisca (en plus elle porte un prénom à faire doublure lumière dans Les feux de l’amour) l’institutrice, qui avant même que je n’aie demandé quoi que ce soit m’assène : « entièrement réalisé dans les règles de l’art »… Seigneur. Quelles règles ? Quel art ?
Mon fils a-t-il peint un vaste papier horizontal en se cassant son petit dos si délicat avant que la peinture (celle qui n’était pas venue se coller directement sur l’ensemble de ses vêtements et le peu de peau découverte qu’il ait) ne soit sèche assez pour reverticaliser son tableau ?
Jackson Pollock, 1912 -1956
Dans le cas de Pollock, l’a-t-elle enivré avant qu’il ne peigne ? Elle en serait capable, la fourbe !
Ou bien mon si petit garçon a-t-il peint dans le froid polaire dans lequel Pollock s’était installé, cette espèce de cabane, non pas au Canada, quoique presque… Au nord de l’état de New York ?
Mais bien évidemment, je sais ce qui me taraude, la ja lou sie, c’est moche ! Celle de voir à quel point les enfants sont éduqués, préparés à accepter, comprendre, incorporer à leur vécu, si jeune soit-il, les œuvres les plus violentes, du XXe et début XXIe siècle. Ça n’a pas de prix. Si ce n’est celui de l’extase d’une mère… On y revient. L’hystérie me gagne autant que le manque de discernement. Mais au fait, que disait Jackson Pollock au sujet de sa propre œuvre ?
Jackon Pollock en action
« Je ne tends pratiquement jamais ma toile avant de peindre. Je préfère clouer ma toile non tendue au mur ou au sol. J'ai besoin de la résistance d'une surface dure. Au sol je suis plus à l'aise. Je me sens plus proche du tableau, j'en fais davantage partie; car de cette façon, je peux marcher tout autour, travailler à partir des quatre côtés et être littéralement dans le tableau. C'est une méthode semblable à celle des peintres indiens de l'Ouest qui travaillent sur le sable. » Cette opération qui consiste à travailler à l'horizontale opère une rupture singulière dans les pratiques culturelles de l'image. Ses implications symboliques et les effets d'échos dans l'art contemporain qui suivit ont été abordés par Yves Alain-Bois.
Ce qui prouve bien par A plus B qu’Hippolyte a parfaitement compris la peinture de Pollock, en plus rustique encore puisque lui n’hésite pas à se rouler dedans, pour s’en imprégner encore mieux. Encore plus. À moins que ce ne soit pour un test lessivier…
Jackson Pollock
Allez, redevenons sérieux sur ce qui est – pour moi – l’un des mythes fondateurs de l’art américain du XXe siècle. Pollock ne partait pas du rectangle de la toile. En effet c'était tout un rouleau de toile qui était partiellement déroulé. La peinture n'allant pas jusqu'aux bords, il lui fallait décider des limites, et cadrer était un choix crucial pour Pollock. Cette pratique était totalement nouvelle et en rupture avec la peinture française, celle héritée de Cézanne où l'on part du cadre pour construire le tableau. Pour qualifier cette nouvelle pratique Greenberg inventa le terme all over ; Jackson Pollock est à l'apogée de son succès en 1950.
 est sélectionné avec un groupe d'artistes américains pour représenter les États-Unis à la Biennale de Venise. Il accumule les œuvres majeures avec drippings et pourings sans jamais se répéter. La figuration qui apparaît encore dans des peintures de 1948 réalisées par le déversement contrôlé d'un fil de laque, apparaît toujours en 1949 dans les figures raclées au couteau à peindre dans plusieurs toiles fraîchement peintes en drippings, dont Out of the web: Number 7.1949. Certaines peintures de 1950 ont été, elles aussi, analysées par Karmel et elles présentent assez clairement des fragments de figures lorsqu'on les bascule de 90° dans le sens des aiguilles d'une montre. Cependant l'ensemble est globalement totalement « abstrait », et c'est cette abstraction radicale qui a surtout été retenue comme étant « le » style de Jackson Pollock. À noter aussi, une expérience en volume : Untitled, Painted terra cotta, 20,3 cm.

Piet Mondrian dira de lui « J'essaie de comprendre ce qui se passe… Je crois que c'est la chose la plus intéressante que j'aie vue jusqu'à présent en Amérique. »

Si comme Hippolyte vous ne pouvez pas vous acheter un Pollock :
Reportez-vous sur les derby « Clarks »  pour hommes façon Pollock de
Jean-Baptiste Rautureau,
24 rue de Grenelle
75007 Paris.

Nail Art’, des ongles à la Jackson Pollock :
Pour une première fois, j'ai plutôt apprécié de tester la technique du Splatter : technique consistant à souffler des gouttes de vernis grâce à une paille. Vous trouverez d'autres versions ou tutos sur le web ! Bon, c'est vrai qu'il faut prendre le coup de souffle main, car comme vous pouvez le voir il y a parfois de gros "splaff" de vernis. Allez, allez, la prochaine fois ce sera mieux !
Je trouve que c'est franchement sympa, original et fun. On peut faire toute une palette de versions en changeant selon vos goûts les couleurs choisies

DVD du film de Ed Harris
Jackson Pollock, le biopic. (en 2000).

Voir aussi...

Humeur 9196666709588008193

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  1. De Francesca Pollock :
    Trop mignon, touchant ! Il faudra emmener Hippolyte voir l'œuvre monumentale (presque 3 m x 6 m) de Jackson Pollock "Mural" qui sera présentée au Guggenheim de Venise l'année prochaine (avril à septembre 2015) et aussi lui faire découvrir une exposition du frère aîné de Jackson Pollock, Charles Pollock, qui aura lieu dans le musée au même moment! 2015 l'année des Pollock au Guggenheim de Venise!

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