FIAC 2014
Vue d'ensemble La FIAC 2014 rassemble au Grand Palais 191 galeries venues de 26 pays. La France est représentée par 48 galeries ...
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La
FIAC 2014 rassemble au Grand Palais 191 galeries venues
de 26 pays. La France est représentée par 48 galeries (25%), puis viennent les
Etats-Unis avec 45 galeries, l’Allemagne avec 26 galeries, le Royaume-Uni avec
14 galeries, l’Italie avec 11 galeries, la Belgique avec 9 galeries, la Suisse
avec 5 galeries, le Brésil et le Mexique avec 4 galeries. 65% des galeries sont
européennes contre 73% en 2013.
Les
pays nouvellement représentés cette année sont la Norvège, l’Arabie Saoudite,
le Portugal, l’Inde et le Japon. 38 galeries participent pour la première fois
ou sont de retour à la FIAC.
La 41ème
édition de la FIAC est aussi l’occasion
de découvrir une programmation artistique exceptionnelle à Paris et en régions,
ainsi que les synergies que la FIAC développe avec les
acteurs de la vie culturelle par des initiatives telles que le Parcours Privé
et la Nocturne des galeries parisiennes.
On l’annonce déjà après seulement 36 heures d’ouverture et
d’exploitation comme un grand succès. Commercial ? A voir, à prouver…
Une allée à la FIAC |
Ça
y est - enfin - l’architecture est totalement consacrée. Elle est elle-même
œuvre d’art. Chef-d’œuvre. C’est la peau de lapin que l’on retourne,
c’est-à-dire que ce que l’on voit de l’extérieur est tout aussi légitimement
grandiose et artistique que les émotions que l’on reçoit à l‘intérieur.
Avec tout ça, Paris, croyez-le, est une enfant plus que
gâtée.
Pour autant le public s’y reconnaît-il ?
N’y a t-il plus de place que pour les acheteurs ?
Les commissaires d’expositions sont-ils devenus des bêtes de
mode, des « marketeurs » dont le but avoué est de voir s’allonger les
files d’attente jusqu’à former de longs escargots pendant trois heures ? C’est
long d’attendre, mais c’est payant et pour tout le monde.
Tentons de discerner les vraies places attribuées à chacun.
Du travail du galeriste à l’achat du collectionneur (que parfois on souhaite
compulsif car l’œuvre ne passera pas, forcément, l’épreuve du temps… des
modes)…
A l’inverse d’une autopsie, c’est une IRM qui nous éclairera
sur l’état actuel du marché.
Il est temps de se poser la seule vraie question qui anime marchands/acheteurs/amateurs :
Quoi de neuf, docteur ?
Pénétrons dans l’antre de verre et de fer du Grand Palais,
laissons-nous aller, c’est facile, jusqu’à la tête de gondole, puisque l’on
tombe tout de suite sur un Olafur Eliasson.
Olafur Eliasson |
L’œuvre d’Olafur Eliasson est estimée, livrée installée, à
400 000 dollars. Il produit très peu, vend tout de suite, et sera l’invité en
décembre de la Fondation Louis Vuitton, the
right man in the right place,
voilà l’équation gagnante du moment. C’est ce que l’on appelle le marketing de
pénurie et ça paie !
The New Planet, cette goutte à facettes tournantes en acier,
aluminium et verre coloré, d’un éclat de couleurs qui vous éclabousse est à
couper le souffle, darde ses rayons ardents dans les poches des marchands aussi
filous qu’initiés. L’acheteur suivra, à n’en pas douter.
On lui a si bien bordé le chemin qu’il ne commettra aucun
faux pas.
Existe t-il d’autres artistes aussi révolutionnaires, qui
gagnent à être starifiés ?
Vraisemblablement oui. Une sorte de top ten.
« Ce sont les nouveaux acheteurs, joueurs venus de la
mondialisation et de ses pays émergents qui ont changé la donne et… font
chauffer le système autour de quelques stéréotypes pour intégrer le club des
gamblers », décrypte un courtier français en poste à Londres.
Henrique Oliveira, Baitogogo,Palais de Tokyo, photo André Morin |
Nathalie Vallois qui s’explique d’ailleurs « Nous ne pouvons nous passer de la promotion que
représentent les foires. Cela nous permet de réactiver nos contacts :
collectionneurs,
institutionnels,
médias, etc. La
FIAC est dans notre pays, aussi nous devons affirmer une présence ».
Ou bien encore Petrit Halilaj, un Kosovar qui ne fait que
dans le XS ou dans le XXXL comme cette installation chez Kamel Mennour : 8
tonnes de terre, 1 pierre de 1,7 tonne, 1 faux lac d’eau savonneuse rose, et 1
cheval mordant 1 poème.
Le Kosovar est en ce moment ce que l’on appelle une
coqueluche, au-delà de la star, le chouchou, le chéri, on décolle de terre, on
oublie l’objectivité du jugement. On aime. Du moins, on se doit d’aimer.
Et enfin à découvrir, ou pas, Latifa Echakhch, elle a
quarante ans et apparaît sur tout ce que la planète compte de foires. Toujours
Kamel Mennour (tiens...tiens…), expose son Tambour et son Fantôme…
Quelques spécialistes pointus, pas mal de professionnels, et
deux ou trois ironiques ne manquent pas de dire que l’art contemporain se
meurt, n’est plus qu’une vaste bulle spéculative, une valeur refuge, comme nos
grands-pères investissaient dans la pierre, et que nous allons voir ce que nous
allons voir avec l’émergence de l’architecture comme prochaine passion-émotion émergente.
Peut-être, en tout cas il serait temps de faire un focus
mérité sur un métier que la France a bien trop longtemps si ce n’est ignoré, au
moins snobé. Qui sait qui est Claude Parent ? Personne. Quelle preuve
gênante d’un retard à combler au plus vite… C’est un des dix plus grands
architectes du monde, il est français qui plus est réalisateur à Cannes du parc
de la Mirandole et père de l’architecture oblique.
Renaud Jerez chez Crèvecoeur |
Pour voir l’art nouveau, le sang neuf, la chance donnée par
la FIAC aux jeunes galeristes émergents, il faut hisser les silhouettes noires
que nous sommes jusqu’au premier étage.
Ne pas en devenir plus snob que le roi pour autant, et ne
pas omettre un détour obligé chez Templon pour les deux splendides Leroy.
Applicat-Prazan et ses murs de coton blanc tendus de Mathieu, constituant le
paroxysme sa période new-yorkaise et sud-américaine. Cy Twombly à pleurer, à
tomber en pâmoison chez Gagosian.
Mais aussi chez Hauser et Wirth (OC 33, je vous le donne
tellement je suis restée bouche bée) Isabelle Huppert encadrée sous tous les
angles, sans fard ni trucage. Courageux. Tomber d’inanition chez Lelong devant
un Rebecca Horn…
Il y a donc tout le monde ou à peu près… Car Paris vit une ère
d’anti McCarthysme subaiguë et l’artiste qui vient de se voir dégonfler son
plug géant vert place Vendôme, non sans qu’il soit premièrement vandalisé et
l’artiste copieusement insulté, ne s’est pas montré chez son galeriste à la
FIAC.
Qu’à cela ne tienne, il tient la corde,
et pas n’importe laquelle avec sa chocolaterie : avec un bon sens
d'Américain, Paul McCarthy, le Père Fouettard de l'art, a demandé à ce que les
ateliers pédagogiques pour enfants soient supprimés. Son exposition s'appelle
pourtant «Chocolate Factory». Mais, méfiance, rien à voir avec Charlie et la chocolaterie, Roald Dahl et Tim Burton
! Ce serait plutôt
L'Écho des savanes appliqué aux arts
plastiques. Ce vétéran de la scène californienne est une forme de dynamite, un
extrémiste de l'art subversif vénéré des collectionneurs, de François Pinault à Patricia Marshall, un chouchou des biennales d'art qui
ne manquent pas d'exposer ses sculptures outrageous
(son Tree gonflable de la place
Vendôme est à double sens, comme le Net puis le public parisien l'ont désormais
compris). Les enfants ne sont pas le cœur de cible de ce provocateur qui
catalyse la violence de la société et ses mensonges politiques dans ses vidéos
trash et volontiers obscènes (Piccadilly
Circus).
Un baby-boomer.
Paul McCarthy est né
le 4 août 1945 à Salt Lake City, dans l'Utah. De cette terre conservatrice
où règne, dit-il, le modèle patriarcal mormon, ce descendant d'Écossais et
d'Irlandais a gardé le souvenir d'un Noël triomphant et imposé, d'un monde en
soi, un peu en marge, singulier, fort loin de la côte Est et de ses codes. «Les
Mormons qui venaient de l'autre côté des Rocheuses ont, dit-il, choisi une
ville circonscrite à une vallée, c'est-à-dire un environnement délibérément
sous contrôle.» Comme les actionnistes viennois, souligne l'artiste qui y a été
souvent comparé, «ce à quoi s'opposer apparaît très clairement en Autriche,
comme dans l'Utah.» De Los Angeles, où il a installé ensuite son studio, il
cite pêle-mêle Larry Rivers, Ed Ruscha et tous ses pairs de la scène
californienne. Mais aussi la lumière, si spéciale, au-dessus de la mégalopole
entre la corniche et l'océan.
Tree Paul McCarthy |
Voix éteinte et rire d'enfant, chez
ce grand-père et mari modèle qui fronce les sourcils, interdit, surpris et
presque contrarié, lorsqu'on lui demande s'il veut choquer le spectateur, le
saisir, le contraindre à réfléchir à quelque chose que justement il préfère
occulter. Ses batailles grotesques à la HP sauce ou au chocolat misent sur le
rejet du scatologique et sur la permissivité sauvage et libératrice des rites
de passage. Pour créer son usine à chocolat, sous les ors restaurés de l’Hôtel de
la Monnaie, McCarthy a racheté un décor
de studio de Hollywood (un bordel mexicain) dans lequel de vrais cuisiniers
feront en série des Pères Noël (vengeurs) du meilleur chocolat. A les regarder
de près, désormais ils nous rappellent quelque chose. L'expérience entre
performance surréaliste et pop culture avait déjà eu lieu dans une galerie
ultra-huppée à New York. Les collectionneurs étaient repartis tout émus, leur
collector comestible sous papier transparent. C'est une arme à retardement. On
vient de le vérifier, place Vendôme.
Jean-Michel Basquiat |
Et…
Last but not least chez Nagel-Draxler (Berlin, Cologne) probablement ce qui
restera comme un CHOC : Mark Dion, le New-Yorkais de 53 ans en
hommage aux créateurs de la Fondation de la Maison de la chasse et de la
nature, François et Jacqueline Sommer, Mark Dion a réalisé une petite cabane de
bois qui rappelle celle des Sommer à Bel-Val, au cœur de leur domaine de chasse
situé dans les Ardennes. À l’intérieur, une série d’objets et de souvenirs
personnels ayant appartenu aux Sommer. Une perle fine, rare, aboutie, parfaite.
Légère. Rassurante comme un gros ventre. Et son odeur de bois pour s’y blottir,
et ses composants organiques pour y survivre. Plaisir pur.
Mark Dion, The Jungle shop, galerie Nagel-Draxler |
de gauche à droite :Zahia, Fleur Pellerin, Manuel Valls |
Voilà terminé le tour du In en se
rengorgeant, on est bien à Paris, de l’art plein la tête, des petites femmes…
de Paris, des ministres… de passage.
Il est temps de se consacrer à la FIAC
(OFF)ICIELLE, avec les impressions de cette première tentative de hors les murs
dès lundi….
Sonia Dubois.