Mon cinéma le dimanche.

Après un long intermède pour cause de fin d’année et de lointain voyage, j’ai repris le dimanche matin, à la faveur de quelques jours pluvi...


Après un long intermède pour cause de fin d’année et de lointain voyage, j’ai repris le dimanche matin, à la faveur de quelques jours pluvieux, le chemin des salles obscures. Hélas, beaucoup de films que je voulais aller voir m’étaient passés sous le nez et, compte tenu de mes goûts, le choix « à la carte » des dernières semaines me laissait hésitante…
J’ai commencé par Un beau dimanche, histoire de ne pas assombrir le paysage.

« Un beau dimanche »
Louise Bourgoin
Joli film de Nicole Garcia, au regard particulièrement tendre sur son fils, Pierre Rochefort. Un rôle pour Louise Bourgoin, inhabituel et touchant, plus intéressant que ceux qui ont été confiés jusque-là à cette ex-demoiselle météo de Canal+… C’est même sur elle plus que sur Rochefort (encensé par la critique) que repose ce film qui, par ailleurs, souffre de ce que l’artiste Ben Vautier, au sujet de la création artistique, appelle un manque de colonne vertébrale.
Les premières images sur l’évacuation brutale d’un squat (dont on comprendra le sens plus tard) n’éclairent pas le récit, si ce n’est pour montrer que Baptiste, ce beau jeune homme qui va d’un travail intérimaire à un autre, dans l’enseignement primaire, est en total flottement par rapport à sa vie… L’intérêt naît de sa rencontre avec Sandra, une fille un peu paumée qui survit, elle aussi, grâce à de petits boulots qu’elle assume mieux que l’éducation de son gamin, confié à un père irresponsable… 
Confrontée à un plagiste marginal et sympa et à d’autres personnages plutôt véreux, l’héroïne surnage, jusqu’à cette rencontre inopinée et salvatrice avec Baptiste (l’instit, qui se retrouve un dimanche avec la garde de Mathias, oublié par le père).
Agréables paysages des plages de Maguelonne, près de Montpellier ; peinture un peu cliché d’une haute bourgeoisie plus bordelaise que montpelliéraine (on ne le précise pas ou alors j’ai dormi), mais avec une apparition remarquable de Dominique Sanda (cette voix inoubliable) en mère digne et absente… En définitive, un film attachant et un bon dimanche !

« American Bluff »
Jennifer Lawrence
Complètement bluffée l’année dernière par Happiness Therapy, film indépendant de David 0.Russel et séduite surtout par le tandem Bradley Cooper/Jennifer Lawrence (je leur prédisais un Oscar, qu’ils ont eu), je me faisais une joie de retrouver les mêmes protagonistes dans une autre aventure, sauf qu’avec American Bluff, la magie n’était pas au rendez-vous… Si cette histoire d'arnaque invraisemblable n’avait pas réellement existé, on aurait pu penser que le réalisateur s’était pris les pieds dans le tapis ; or pas du tout, c’est, en gros, comme ça que les choses se sont passées. Afin de piéger le maire sympathique et corrompu d'une ville du New Jersey, le FBI et un de ses agents s'acoquinent avec un couple d'escrocs.
Pourquoi n’ai-je pas marché ? Peut-être parce que les deux rôles principaux, Sidney (Amy Adams) et Irving (Christian Bale) en font un maximum (transformation  physique, chère à Hollywood, etc.) jusqu’à tomber dans un pastiche un peu éculé. Bradley Cooper, en flic fasciné par les voyous, s’en sort beaucoup mieux, malgré ses histoires de frisettes…Quant à Jennifer Lawrence, elle est tout simplement époustouflante en femme infidèle et stupide d’un truand (ne pas rater la scène du micro-onde). 
David 0.Russel, contrairement à son magnifique Happines Therapy (revu à la télé ces jours-ci), semble avoir balancé entre la farce et la comédie de caractères. Ses portraits sont trop appuyés pour faire rire et pas assez développés pour émouvoir… Du coup, on s’ennuie un peu et on trouve le temps long…
PS. Vous verrez, Jennifer Lawrence n’a pas fini de nous étonner. Sa beauté, l’intelligence de son jeu la placeront sur la plus haute caisse (comme disent les sportifs aux J.O.). 

Abus de faiblesse

Isabelle Huppert & Kool Shen
J’ai un gros problème avec le cinéma de Catherine Breillat : je ne l’apprécie pas, ou pour être plus honnête, je n’aime pas le registre sur lequel elle joue. Elle se pose en victime (mettons à part son AVC, un regrettable accident) de la critique, du système, des médias, alors que ceux-ci lui rendent un hommage qui va au-delà des qualités de son cinéma… et en même temps, elle se veut maîtresse des situations auxquelles elle est confrontée (comme le personnage de Maud dans Abus de faiblesse).
Voici le pitch : « Victime d’une hémorragie cérébrale, Maud, cinéaste, se réveille un matin dans un corps à moitié mort qui la laisse hémiplégique, face à une solitude inéluctable. Alitée mais déterminée à poursuivre son projet de film, elle découvre Vilko, arnaqueur de célébrités, en regardant un talk-show télévisé. Son arrogance crève l’écran avec superbe : Maud le veut pour son prochain film.
Ils se rencontrent. Il ne la quitte plus. Elle aussi, il l’escroque et lui emprunte des sommes astronomiques. Il lui prend tout mais lui donne une gaieté et une sorte de chaleur familiale (je n’ai rien vu, pour ma part, d’une quelconque chaleur familiale). »

Cet abus de faiblesse, Breillat en a été réellement victime et les faits ont été jugés en 2012 : « Christophe Rocancourt a été condamné à seize mois de prison dont huit ferme et 578 000 euros d’amende pour «abus frauduleux de l’ignorance ou de la faiblesse d’une personne en état de sujétion psychologique ou physique».

Y a-t-il là de quoi faire un film ? Oui. Breillat en a-t-elle fait une œuvre d’art ? Je ne le pense pas. Ce film se veut le plus réaliste possible, sans passion (Maud ne veut pas que Vilko la touche), sans explication psychologique. Ce n’est ni une autofiction, ni une reconstitution d’un fait divers… (c’est ce que j’ai lu dans une critique dithyrambique).
En quoi alors cet ovni est-il une œuvre d’art ? Ses formes, ses couleurs, ses situations n’ont rien d’inédit ; le jeu de ses acteurs non plus (Isabelle Huppert nous a habitués à sa gestion sans affect des drames de la vie à la laquelle elle ajoute, ici, une gesticulation très énervante, mimant les suites d’un AVC), pas plus que la prestation de Kool Shen, qui est honorable pour un débutant à l’écran.
Que trouve-t-on de sublime (ou de sublimissime, comme on dit à Paris) dans ce film ? Je ne l’ai trouvé que dans la critique d’Olivier Séguret pour Libération, qui rapproche l’interprétation d’Isabelle Huppert d’une sorte de métempsychose et conclut son article ainsi : « Une extraordinaire scène finale, plan séquence maintenu dans la durée où le visage de l’actrice s’altère, en temps réel, des marques du désespoir, fait décoller Abus de faiblesse vers un inattendu sommet à la Dreyer. »  Voilà, la messe est dite !

Sandrine Kiberlain

Dernière minute.
La 39ème cérémonie des Césars nous a livré un palmarès bien falot :
Guillaume Gallienne et « Les garçons et Guillaume, à table ! » sont tous deux extrêmement divertissants mais ne méritent pas tant de prix… Pas, en tout cas, celui de « Meilleur film » qui souligne l’absence incompréhensible de La vie d’Adèle.
Un « Meilleur acteur dans un second rôle » pour Niels Arestrup, ça manque un peu trop d’inattendu…
En revanche, bravo à la consécration de Sandrine Kiberlain comme « Meilleure actrice », titre qu’elle méritait depuis longtemps.
Le « Meilleur espoir féminin » ne pouvait aller qu’à Adèle Exarchopoulos !
Je n’ai pas vu le film Suzanne, mais je saisis l’occasion de dire, à la faveur du prix d’Adèle Haenel comme « Meilleure actrice dans un second rôle », combien la réalisatrice Katell Quillévéré, dont j’ai vu dernièrement le beau film Un poison violent,  est un des espoirs du cinéma français.
Dernière satisfaction, le prix du « Meilleur film étranger  à Alabama Monroe, un film tendre, à la musique envoûtante de Félix Van Groeningen.
Pour conclure, je suis rassurée, et sur mon jugement et sur celui des autres, en constatant que  L’Inconnu du lac n’a récolté qu’un prix du « Meilleur espoir masculin » pour Pierre Deladonchamps, un beau jeune homme dont la qualité première est sans doute de plaire !

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