Retrouver les salles obscures
Le Tout Nouveau Testament et Youth . Une furieuse envie de cinéma m’a poussée, le premier jour d’une pluie d’automne à Nice, à al...
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Le Tout Nouveau Testament et Youth.
Une furieuse envie de cinéma m’a poussée, le premier jour
d’une pluie d’automne à Nice, à aller voir deux films, l’un que je désirais ne
pas manquer : Youth,
l’autre Le Tout Nouveau Testament,
pour accompagner mes fidèles compagnons des salles obscures…
Prenons le processus à rebours, j’ai choisi de vous
parler du second d’abord, puis de Youth.
Dans les deux cas, je vais me livrer à un exercice qui me dérange un peu, aussi
bien pour le cinéma que pour les expositions, celui d’être critique. Mais m’y
soustraire serait ne pas parler de cinéma et pour combien de temps ? Les
chefs-d’œuvre ne courent pas les salles… Entendons-nous bien, ce n’est que
subjectif !
Le Tout Nouveau
Testament,
du réalisateur belge Jaco Van Dormael, sélectionné à La Quinzaine du Festival de Cannes, m’a laissée au bord du chemin, malgré
sa pléthore d’acteurs connus, Benoît Poelvoorde, Yolande Moreau, Catherine
Deneuve, François Damiens…
Je vous donne le synopsis : " Dieu existe. Il habite à Bruxelles. Il est odieux avec sa femme et sa
fille. On a beaucoup parlé de son fils, mais très peu de sa fille. Sa fille,
c’est moi. Je m’appelle Ea et j’ai dix ans. Pour me venger j’ai balancé par SMS
les dates de décès de tout le monde. "
EA, Pili Groyne |
Pensée
par Jaco Van Dormael comme un conte (il le revendique), cette histoire aurait
pu être merveilleusement loufoque et décoiffante, compte tenu du thème et de cette
brillante distribution, mais passé le premier choc - Benoît Poelvoorde en Dieu
satanique, manipulateur de catastrophes -, on assiste à une succession de saynètes
où chaque protagoniste fait son numéro, avec comme fil conducteur le récit d'Ea,
alias Pili Groyne, une enfant, bonne actrice débutante à qui, cependant, on
demande l’impossible, porter le film sur ses jeunes épaules…
Je
n’ai vu aucun des films de Jaco Van Dormael : Toto le héros ; Le Huitième
Jour ; Mr. Nobody…mais je
crois savoir que la critique a souvent vu son œuvre comme une peinture onirique
et poétique de l’innocence, un hymne à la vie et au bonheur…
C’est,
en effet, ainsi qu’on peut voir le film, un conte raconté par une enfant qui
tente de changer le monde exécrable dans lequel nous vivons en un univers où
chacun, à l’écoute de la petite musique qu’il a en lui, vivrait librement, sans
se soucier du reste…
Jaco Van Dormael a conçu un joli conte qui pose la bonne question : que
ferions-nous de notre vie si nous en connaissions exactement la fin ? Mais
autour de ce thème largement suffisant, mais ô combien difficile, il a enfilé
un nombre incroyable de petites
histoires, drôles parfois, parfois grotesques, – qu’allait faire Catherine Deneuve
dans cette galère – avec comme trame une idée rocambolesque d’un Tout Nouveau Testament (je renonce à
toute explication) saint-sulpicien en diable, pétri de bons sentiments, où
perce en filigrane un discours un brin moralisateur… Le côté Hellzapoppin aurait pu marcher, s’il
avait été plus poussé vers l’absurde et surtout si Dormael avait trouvé le bon rythme
à donner à son récit.
Pour Youth, j’étais dans de meilleures
dispositions, prête à aimer le film à tout prix, même si La Grande Bellezza m’avait précédemment déçue et sachant qu’à
Cannes Youth avait été salué par des
délires d’applaudissements ou des huées, que dans les deux cas, il ne méritait
pas. J’avais aussi lu et apprécié une interview de Michael Caine où l’acteur
répondait au journaliste lui demandant s’il n’était pas triste de vieillir :
" je préfère être vieux que mort " !
Même
l’interminable queue devant le cinéma, fait rare à Nice pour un film autre que Titanic ou Bienvenue chez les Ch’tis et l’attente sous la pluie ne m’avaient pas
découragée. Hélas, mes espoirs n’ont pas été comblés.
Michael Caine et Hervé Keitel |
Synopsis : " Fred
Ballinger et Mick Boyle, tous deux presque octogénaires, sont amis depuis très
longtemps. Les deux hommes ont un autre point commun : ils font partie des
prestigieux pensionnaires d'un hôtel de luxe situé au pied des Alpes. Fred,
compositeur et chef d'orchestre, est bien décidé à ne plus travailler, malgré
de sérieuses sollicitations. Mick, cinéaste, est, lui, bien résolu à poursuivre
sa carrière et travaille au scénario de son prochain film. Les deux hommes sont
par ailleurs confrontés aux problèmes de leurs enfants, dont les vies
sentimentales sont compliquées…"
Autour
de nos deux protagonistes, défilent, dans un inventaire à la Prévert, divers
spécimens d’une humanité argentée et plutôt larguée, comme un jeune acteur
américain qui prépare un rôle et boit des cocktails au bord de la piscine, une
star du foot, obèse et tatoué (joli exercice avec une balle de tennis), un
couple muet, un moine tibétain en position de lotus, la fille trompée du chef
d’orchestre, un alpiniste allumé et silencieux, l’équipe de tournage de Mick et
que sais-je encore…
Fred Ballinger et Mick Boyle |
Il
s’agit, là encore, de savoir ce qu’on fait du temps qui passe et Michael Caine
et Hervé Keitel, vieux complices prostatiques, font quelques belles passes
d’armes, mais elles sont bien souvent attendues. D’autres scènes le sont moins,
mais elles sont grotesques, comme Caine dans un pré, dirigeant un orchestre de
vaches qui meuglent au rythme des cloches ou encore Jane Fonda en vieille
actrice hystérique, en proie à une crise de nerfs…
Certes, Paolo
Sorrentino dirige ce petit monde avec brio, mais jette sur cette humanité à la
dérive un regard condescendant qui ôte à son propos le tragique et l‘émotion
qu’ils auraient pu susciter.